Fiches Informatique & Numérique - Fonctions avancées

André Laurens - Café’in Numérique - v2 - février 2024

Gestion des mots de passe

L’utilisation d’applications web ou mobile - qu’il s’agisse de communiquer, d’effectuer des démarches administratives ou des achats en ligne, d’accéder à des contenus divers ou à des services associatifs - s’accompagne de plus en plus systématiquement de l’ouverture d’un compte utilisateur ou client, et d’une procédure d’authentification avec identificateur et mot de passe pour accéder au service.

Tant qu’il y en avait peu, on pouvait espérer les retenir. Au-delà de la dizaine, c’est mission impossible pour la plupart des gens, même en employant des martingales ou autres moyens mnémotechniques. Il faut donc les noter quelque part.

Le propos de cette fiche est de faire un point sur la question.



Règles de base et principe de la solution

Dans le contexte actuel ou le piratage et la captation d’information personnelles sont monnaie courantes, disons tout de suite ce qu’il ne faut pas faire en la matière :

Pour de bons mots de passe, voir ci-après :

Pour pouvoir gérer de nombreux comptes, il existe depuis assez longtemps des logiciels de stockage des identificateurs et mots de passe, plutôt orientés ordinateur. Leur principe, rappelé plus bas, est de stocker les informations dans une base de données cryptée, stockée sur l’ordinateur.

Avec le développement des terminaux mobiles, il faut adapter ces solutions à un usage nomade, pour avoir accès à ses mots de passe n’importe où.

La solution la plus rapide à mettre en œuvre, et de ce fait très tentante, est d’utiliser le service qui vient avec l’operating system, et donc confier ces données personnelles à Google ou Apple. Autant dire que l’on fait entrer le loup dans la bergerie.

C’est pourquoi, la présente fiche se concentre sur les logiciels libres et décrit :

Offre en logiciels libres

Les KeePass*

NomOSCommentairesTestFiche
KeePassGNU/Linux, BSD, Mac OS X, Windows, AndroidLogiciel Windows à l’origine, multiplateforme aujourd’huiutilisé sous Windows : OKhttps://framalibre.org/content/keepass
KeePassXGNU/Linux, Mac OS X, Windows, AndroidA l’origine, portage Linux de KeePass, logiciel Windows ; les deux sont multiplateforme aujourd’huiutilisé sous Linux : OKhttps://framalibre.org/content/keepassx
KeePassXCGNU/Linux, Mac OS X, WindowsFork communautaire de KeePassX pour pallier au développement très lent de KeePassXtesté sous Linux et Windows : OKhttps://framalibre.org/content/keepassxc
KeePassDXAndroidGestionnaire de fichiers KeePass multiformats, compatible avec la majorité des programmes alternatifs (KeePass, KeePassX, KeePassXC...)testé sur mobile Android : OK (avec quelques limitations indiquées plus bas)https://framalibre.org/content/keepassdx
KeePassDroidAndroidPortage sous Android du logiciel KeePasstesté sur mobile Android : OK (mêmes limitations que KeePassDX)https://framalibre.org/content/keepassdroid

Les autres

NomOSCommentairesTestFiche
KeeWebGNU/Linux, Mac OS X, Windows, Android + app webcf. description détaillée plus bastesté l’appli desktop sous Linux, l’appli web sous Linux et sur mobile Androidhttps://framalibre.org/content/keeweb ; site officiel : https://keeweb.info/
LessPassGNU/Linux, Mac OS X, Windows, Android, FirefoxOSne stocke pas les mots de passe mais permet de générer des mots de passe uniques pour chaque service, et de les régénérer à l’identique à la prochaine visite, à partir d’un mot de passe principalnon testé, a paru plus orienté geek qu’utilisateur lambdahttps://framalibre.org/content/lesspass
PassboltGNU/Linux, BSD, Mac OS X, WindowsGestionnaire de mots de passe libre conçu pour la coopération, permet aux membres d’une équipe de stocker et partager leurs mots de passe de manière sécurisée, et d’être intégré à un écosystème existant par l’intermédiaire de son API et de son client consolenon testé, a paru peu adapté à un usage personnelhttps://framalibre.org/content/passbolt
Password SafeGNU/LinuxGestionnaire de mot de passe basé sur le format Keepass v.4 et intégré à l’environnement de bureau GNOMEnon testé, car trop limité par son implémentation uniquement pour Linux/GNOMEhttps://framalibre.org/content/password-safe

Évaluations

N.B. : faute de disposer de matériel Apple, les tests ont été effectués sur un ordinateur Linux, un ordinateur Windows 10, un smartphone et une tablette Android.

Fonctionnement des KeePass*

L’application permet de constituer des bases de mots de passe dans des fichiers cryptés (formats *.kdb ou *.kdbx, devenus une sorte de standard du fait de la popularité de l’application), protégés par un mot de passe (c’est le seul dont il faille se souvenir !) ou avec un fichier clé de cryptage.

Le principe est de créer dans la base autant d’entrées que de sites ou services web utilisés. Un entrée est décrite par un nom, l’URL du site, l’identificateur de l’utilisateur (username), le mot de passe (password), et d’autres champs optionnels (dont une possibilité de provoquer l’expiration du mot de passe). Les entrées peuvent être organisées en onglets, et une gestion de “corbeille” est intégrée à l’outil. Bien sûr on peut créer autant de bases de mots de passe que l’on veut, chacune étant protégée par un mot de passe. Toute modification effectuée sous l’éditeur doit être enregistrée dans la base pour être conservée.

L’accès au site (ouverture de l’URL dans le navigateur, remplissage des champs identificateur et mot de passe) est automatisé avec des raccourcis.

Principe de la “nomadisation”

La plupart des logiciels cités plus haut (et les KeePass en particulier) stockent les mots de passe dans une base de données locale (les fichiers *.kdb ou *.kdbx) ; l’idée de la gestion nomade est alors de placer ladite base de données sur un espace partagé sur le cloud. Ici on fait le test avec un cloud Nextcloud accédé :

KeePassX : test du partage cloud

Sur PC Linux :

Sur PC Windows :

KeePassXC

Sur PC Linux :

KeePassDX

Sur smartphone et tablette Android :

Fonctionnement avec des fichiers locaux : RAS

Ouverture de la base de données sur l’espace cloud : on retrouve tous les mots de passe, mais les accès à un fichier sur le cloud peuvent être capricieux :

Ce comportement, que l’on n’observe pas sur ordinateur, pourrait provenir de la différence entre les modes d’accès, avec le cloud utilisé, entre ordinateur et mobile :

L’application reste parfaitement utilisable pour accéder aux mots de passe en lecture, en s’astreignant à ne faire les modifications de la base que sur ordinateur.

L’application installée depuis le Google Play Store a le même comportement.

KeePassDroid

Sur smartphone Android :

Le même problème d’enregistrement des modifications effectuées depuis le mobile éprouvé avec KeePassDX se produit avec KeePassDroid, de façon tout aussi explicite (message d’erreur : “failed to store database”).

KeeWeb

Cette application (assez riche en fonctionnalités donc un peu complexe) permet la gestion de mots de passe dans des fichiers au format KeePass :

L’utilisation de fichiers locaux n’est bien sûr pas la solution pour un usage nomade, d’autant que l’on verra que les mécanismes de sauvegarde / synchronisation sont dépendants des choix de configuration de l’outil.

A noter que la base au format KeePass étant cryptée, la stocker sur un Google Drive ou un OneDrive, est moins risqué que confier directement la gestion des mots de passe à Google…

KeeWeb est diffusée sour la forme d’une application desktop pour les cibles courantes (GNU/Linux, Mac OS X, Windows) qui fonctionne peu ou prou comme les KeePass* mais la saisie automatique n’est pas aussi immédiate :

Apparemment, pas d’application pour mobile Android ou iOS.

A la place, une application web pour usage nomade depuis tout ordinateur ou mobile via un navigateur. Cette application fonctionne à première vue comme l’application desktop, mais de notables différences existent, que l’on verra dans les paragraphes suivants.

Application desktop

L’application permet d’ouvrir des fichiers locaux, et il faudra explicitement sauvegarder le fichier pour conserver les modifications effectuées. Les fichiers “nomades” sur le cloud comme mis en place pour le test des KeePass* ci-dessus sont vus comme des fichiers locaux (donc attention à sauvegarder) mais semblent pouvoir être aussi synchronisés comme les espaces distants ci-après.

L’application permet d’accéder à des espaces cloud (cf. liste plus haut) en passant par une connexion explicite au serveur via une boîte d’authentification (dont le contenu diffère selon le serveur et le protocole) : testé OK avec WebDAV (le cloud Nextcloud utilisé plus haut) et avec Google Drive. L’application mémorise les derniers fichiers ouverts et les paramètres de connexion au serveur (le niveau de mémorisation se règle dans les paramètres).

La synchronisation des modifications peut se faire de plusieurs façons :

Une dernière façon d’avoir un usage nomade est de mettre les fichiers de mots de passe sur une clé USB que l’on pourra accéder comme un fichier local.

Application web

On l’active via l’URL https://app.keeweb.info/ et on retrouve la même interface qu’avec l’application desktop, mais :

Les modalités de synchronisation sont les mêmes que pour l’application desktop et fonctionnent de la même manière.

Extension navigateur

Pour bénéficier de la saisie automatique des username et password, il faut installer une extension au navigateur. En fait, il y en a deux :

Cette extension semble ne pas être disponible sur mobile Android (pas trouvée pour Firefox, ni pour Chrome), aussi l’a-t-on testée uniquement pour Firefox sur ordinateur Linux.

Une fois installée, elle apparaît sous la forme d’un icône dans la barre de menu, qui permettra de l’activer et d’en configurer le fonctionnement, en particulier le mode de connexion :

Quand on a besoin de s’authentifier sur un site web, il suffit de cliquer sur l’icône, la base est présentée, et un clic sur l’entrée voulue effectue la saisie automatique des username et password.

Application Nextcloud

Il existe une application KeeWeb spécifique pour Nextcloud, qui permet d’ouvrir des bases de mots de passe au format KeePass dans Nextcloud avec Keeweb juste en cliquant sur un fichier *.kdbx dans l’explorateur de fichiers de Nextcloud. Le service semblant d’un intérêt limité et la procédure d’installation un peu complexe, cette application n’a pas été testée.

Conclusion

On trouve une offre assez riche dans le domaine des logiciels libres pour réaliser une gestion nomade des mots de passe. Néanmoins, certains logiciels sont perfectibles, bien que “faisant le job”, au prix de quelques limitations.

Le choix reste entre les 2 grandes familles - les KeePass* et KeeWeb - et pourrait se résumer ainsi :